Place de la Bastille - Marais - Paris

S’il est un quartier parisien où l’Histoire palpite encore sous les pavés, c’est bien celui de la Bastille. Symbole de la Révolution française, l’ancienne forteresse détruite en 1789 a laissé place à la colonne de Juillet, surmontée du flamboyant Génie de la Liberté. Aujourd’hui encore, ce lieu reste un haut lieu d’expression populaire, théâtre de rassemblements et de revendications qui font battre le cœur de la capitale, de la France et du monde.

Mais Bastille, c’est bien plus qu’un souvenir de révolte. C’est un quartier en perpétuelle réinvention, où l’Opéra Bastille, scène de renommée internationale, fait rayonner une création lyrique contemporaine et audacieuse dans un écrin de verre et de métal.

À ses pieds, dépaysement total  : le bassin de l’Arsenal, qui relie la Seine au canal Saint-Martin, déploie ses péniches amarrées et quais arborés pour une pause au vert ou un apéro tranquille les pieds (presque) dans l’eau. Et si l’on aime se perdre, les cours pavées et ruelles cachées qui serpentent autour du faubourg voisin racontent en silence le passé artisan et ouvrier du quartier. Tandis que la rue de Lappe, joyeuse et populaire, prolonge l’esprit festif de Bastille jusqu’au bout de la nuit. Enfin, pour les gourmands, rendez-vous au marché de la Bastille, l’un des plus généreux de Paris, véritable voyage sensoriel entre produits frais, accents chantants et couleurs du monde.

Bastille, c’est Paris dans toute sa richesse : historique, créatif, dépaysant, festif et gourmand. Suivez-moi dans ce quartier révolutionnaire !

Après notre balade, vous trouverez mes recommandations d’hôtels, de restaurants et de livres en toute fin d’article.

Eglise Saint-Paul-Saint-Louis - Le Marais - Paris

La prison de la Bastille, du despotisme à la liberté

La Bastille incarne la bascule entre despotisme et liberté. Construite au XIVe siècle sous le règne de Charles V pour défendre l’est de la ville contres les Anglais, cette imposante forteresse devint rapidement une prison d’État, synonyme d’arbitraire royal. On y entrait sans jugement, souvent pour avoir simplement trop parlé, trop écrit, ou trop pensé. La Bastille, « prison de la pensée », devient ainsi le symbole honni de la censure et du pouvoir absolu, un lieu où l’on réduisait au silence les esprits libres. Le marquis Donatien de Sade, par exemple, y fut enfermé plus de cinq ans, dans la malnommée « tour de la Liberté », avant d’en être transféré juste dix jours avant la prise de la Bastille par 600 émeutiers, le 4 juillet 1789. Voltaire passa pour sa part 15 mois dans la forteresse lors de deux séjours. À l’inverse, Montaigne n’y passa qu’une seule journée en 1588, preuve que même les plus modérés pouvaient y goûter l’humiliation de l’enfermement. Quant à l’énigmatique « Masque de Fer », et le fantasque comte Cagliostrio,  ils restent parmi les prisonniers les plus mystérieux de l’histoire de France…

Aujourd’hui, ironie pleine de sens, c’est sur cette même place que l’on se rassemble pour s’exprimer et revendiquer : les grandes causes s’y donnent rendez-vous, des manifestations citoyennes aux marches pour les droits humains. L’ancienne prison est devenue un espace d’ouverture et de parole, où l’on revendique haut et fort ce que l’on murmurait autrefois derrière les barreaux…

Non loin de la place, au 8 rue Saint-Antoine, une statue rend hommage au philosophe, dramaturge, écrivain (et espion!) Beaumarchais, dont les tirades contre la censure royale résonnent encore : « Sans la liberté de blâmer, il n’est point d’éloge flatteur ». Lui aussi fut surveillé, censuré, et son théâtre interdit avant de triompher : un parfait symbole de la lutte pour la liberté d’expression. Le 14 juillet 1789,  de la terrasse de sa somptueuse villa (située jadis au début de l’actuel boulevard Richard Lenoir, en face de l’hôtel particulier de Sagonne construit au 17e siècle par l’architecte du « Roi Soleil » à l’actuel 23 bd Beaumarchais ), l’écrivain assiste aux premières loges de la prise de la Bastille…

Eglise Saint-Paul-Saint-Louis - Le Marais - Paris

Les pierres de la Bastille…

Après sa démolition commencée dès le 15 juillet 1789, les pierres de la Bastille furent dispersées et vendues sous forme d’objets les plus divers : maquettes, clés, encriers, bijoux… Une partie furent utilisées pour édifier le pont de la Concorde, qui relie aujourd’hui l’Assemblée nationale. Un renversement hautement symbolique : les pierres de l’absolutisme réemployées pour accéder au lieu même du débat démocratique à partir de la place où fut décapité Louis XVI… Aujourd’hui,  face à la banque de France donnant sur le faubourg Saint-Antoine, le sol de la place de la Bastille est jalonné de repères et pavages délimitant l’emplacement de la sinistre forteresse.

En 1899, lors du creusement de la ligne 1 du métro, les ouvriers mirent au jour les fondations de la tour de la Liberté – celle où fut notamment détenu le « divin marquis » de Sade. Elles furent démontées pierre par pierre, puis repositionnées dans le square Henri-Galli, à deux pas de l’Arsenal. Et si vous prenez la ligne 5 du métro à Bastille, direction Bobigny, ouvrez l’œil : sur le quai, un morceau du mur de la contrescarpe est encore là, discret mais bien réel. On peut même en voir l’autre face derrière une vitre dans les couloirs, près de l’entrée du boulevard Bourdon.

Colonne de Juillet - Bastille - Le Marais - Paris

La Colonne de Juillet : la mémoire des révolutions françaises

Impossible de la manquer : la Colonne de Juillet s’élance au centre de la place de la Bastille, à l’endroit même où fut démolie la célèbre prison. Ce monument de 180 tonnes de bronze rend hommage non pas à 1789… mais à une autre insurrection : celle des « Trois Glorieuses » de juillet 1830. Trois jours de pavés soulevés, de barricades et de combats, qui menèrent à la chute du roi Charles X. Sous la colonne, une crypte funéraire abrite les 504 corps de révolutionnaires, inhumés là pour « s’être armés pour la défense des libertés publiques ». Leurs noms sont gravés et recouverts de feuille d’or sur la colonne. Mais l’histoire ne s’arrête pas là : en février 1848, Paris se soulève à nouveau, cette fois contre Louis-Philippe, le “roi citoyen” qui lui-même fit jadis ériger la colonne ! Il est contraint de fuir, et son trône, saisi au palais des Tuileries, est transporté place de la Bastille… où il est brûlé au pied de la colonne, dans un geste symbolique saisissant. La 2ème République décide alors que 196 autres corps des morts de cette nouvelle Révolution viendront rejoindre la colonne dans un second sarcophage dédié.

En parlant de République, savez vous que les soldats du régiment de cavalerie de la Garde Républicaine sont logés proche de la Bastille ? Exactement dans la caserne des Célestins située au boulevard Henri IV dans le quartier de l’Arsenal ! C’est aujourd’hui la plus grande formation montée au monde. Peut-être croiserez vous ces magnifiques chevaux et soldats dans les rues du Marais…

La colonne surplombe le canal Saint-Martin qui passe juste en dessous de la place de la Bastille. D’une grille discrète lors de votre visite, vous verrez peut-être passer une péniche…Un détail qui ajoute au charme secret des lieu et à leur part d’ombre. Car la colonne cache aussi ses légendes, à commencer par celle du célèbre éléphant de Bastille : un projet grandiose de Napoléon Ier, qui rêvait d’ériger ici une fontaine monumentale en forme de pachyderme géant, haut de 24 mètres. Seule la structure provisoire en plâtre fut réalisée — elle resta des années à l’abandon. Victor Hugo en fit un abri pour Gavroche dans « Les Misérables ». Les fondations de cette fontaine dont l’eau devait venir du canal sont aujourd’hui le socle de la colonne de marbre rouge orné de médaillons et de têtes de lions…

Le Génie de la Bastille - Le Marais - Paris

Momies égyptiennes et bon Génie…

Mais la plus troublante — et sans doute la plus romanesque — des histoires liées à la Colonne de Juillet est celle des momies. Avant que les révolutionnaires de 1830 ne soient honorés comme il se doit, leurs corps furent jetés dans une fosse commune, sans cérémonial. Et ils n’étaient pas seuls. Six momies (dont dit-on le grand prêtre Pentamenou !) rapportées d’Égypte par les scientifiques de Napoléon et du Directoire, entreposées un temps dans les réserves du Louvre, avaient fini par pourrir sur place, oubliées, puis elles aussi ensevelies dans cette même fosse, comme de vulgaires rebuts d’Histoire. Lorsque, des années plus tard, on décide d’offrir une sépulture digne aux héros des Trois Glorieuses, on exhume cette fosse… et, avec les révolutionnaires, on déplace aussi ce qu’il reste des momies. Impossible de les trier. Et ainsi, sans le vouloir, on enterre un peu d’Égypte antique sous la Bastille. Cela, presque à l’emplacement de l’éphémère fontaine  d’Isis (dite de la « Régénération ») construite par les révolutionnaires de 1793. La rumeur n’a pas tardé à courir : un pharaon sous la Bastille ? Il n’en fallait pas plus pour allumer les imaginations… Une légende urbaine était née. Elle fait encore sourire les historiens, mais avouez que ça ajoute un sacré relief à notre promenade…

Au sommet enfin, à 52 mètres de hauteur, rayonne le Génie de la Liberté, sculpté nu comme un vert par Auguste Dumont au dessus de quatre garçons également en tenue d’Adam et protégés par des mufles de lion. Ce personnage ailé, orné à la feuille d’or, brandit la torche de la civilisation et tient dans sa main gauche des chaînes brisées. Allégorie de la liberté conquise, il est parfois interprété comme une figure de Lucifer — au sens originel du terme : le porteur de lumière, libéré des contraintes. Un symbole fort, né dans une époque de ruptures et d’espoirs. Sur le sol de la colonne se trouvent un chapelet de svastikas (roues solaires) ainsi que des roses des vents indiquent les points cardinaux vers lesquels soufflent « aux quatre vents »  et pour l’Humanité entière, l’esprit de ce Génie de la Liberté, cet ange protecteur des libertés du Marais et d’ailleurs ! Autour de cette colonne axiale, treize voies chargées d’histoires rayonnent autour de la place de la Bastille. Un chiffre qui porte bonheur…

Bassin de l'Arsenal - Bastille - Le Marais - Paris

Le Bassin de l’Arsenal : la douce escale…

À deux pas de l’effervescence de la place de la Bastille se niche une parenthèse dépaysante : le bassin de l’Arsenal creusé en 1805 à l’emplacement des fossés de l’enceinte de Charles V, dans le prolongement du Canal Saint Martin qui passe sous la place de la Bastille. Ici, les bruits de la ville s’estompent, remplacés par le clapotis des bateaux et le chant discret des oiseaux. Depuis 1983, ce bassin — autrefois dédié aux marchandises — s’est mué en un petit port de plaisance accueillant près de 200 embarcations rejoignant parfois la Seine voisine via la si poétique écluse de l’Arsenal. Le long de ses berges s’épanouissent roseraies, pergolas couvertes de chèvrefeuille et de clématites, pelouses pour s’étendre, la terrasse du « Grand Bleu » pour déjeuner au bord de l’eau, aires de jeux pour les enfants, sans oublier une atmosphère presque méridionale quand le soleil est de la partie.

Un détail mérite l’attention des promeneurs avertis : la passerelle centrale porte le nom de Jim Morrison. Oui, le chanteur mythique des Doors, dont la dernière demeure fut un appartement au 17 rue Beautreillis tout proche ! Un clin d’œil rock, poétique et inattendu, à l’ombre des péniches.

Et pour celles et ceux qui rêvent de naviguer, Canauxrama propose au départ du port de Bastille des croisières sur les canaux parisiens — une traversée de Paris par ses eaux intérieures, entre écluses, tunnels, ponts tournants et secrets urbains. So romantic !

Dernier conseil, si vous êtes sur la ligne 1 du métro, sachez que la station Bastille est (pour moi) l’une des plus belles de Paris :  sur le quai en direction du château de Vincennes se dévoile une vue charmante sur le port –  en direction de la Défense, une fresque vous déroule les grands épisodes révolutionnaires !

Opéra Bastille - Le Marais - Paris

Opéra Bastille, le sommum de l’art lyrique

Si vous cherchez à vivre une soirée parisienne d’exception, l’Opéra Bastille est une valeur sûre. L’éclatante modernité de son architecture comme la magie de ses productions lyriques devraient vous éblouir. Le projet de sa construction à l’emplacement d’une ancienne gare ferroviaire remonte à 1983, sous l’impulsion du président de la République François Mitterrand et sur proposition de son ministre de la culture d’alors : Jack Lang, un « Maraisien » que vous croiserez peut-être encore aujourd’hui dans les rues et sur les terrasses du quartier. Saluez le de la part de Julien Dumarais ! Le projet retenu, conçu par l’architecte Carlos Ott, visait à créer un espace accessible, ouvert, et en phase avec son époque. Inauguré le 13 juillet 1989 avec l’oeuvre « La nuit avant le jour » de Bob Wilson devant notamment 32 chefs d’Etat pour célébrer le bicentenaire de la Révolution française, l’Opéra Bastille est une véritable prouesse architecturale. Avec ses 2745 places, toutes avec vue et acoustique exceptionnelle, c’est la plus grande salle d’opéra d’Europe ! Je vous en dit plus via ce lien dans un article que j’avais spécialement rédigé sur ce lieu magique.

Pour une soirée réussie, pensez à réserver vos billets à l’avance, surtout pour les spectacles les plus prisés. Personnellement, je passe par Music & Opera, un spécialiste qui m’a souvent évité des frustrations en me trouvant des places même lorsque Bastille affichait complet. Arrivez tôt pour profiter de l’ambiance unique du lieu et peut-être savourer un verre de Champagne avant le début du spectacle.

A noter :

  • l’opéra propose des visites guidées (en français) des coulisses et de la scène – voir ce lien
  • dans le bâtiment de l’opéra au 110, rue de Lyon : le Grand Palais Immersif est depuis 2022 un espace culturel dédié aux expositions immersives qui fusionnent art et technologie pour offrir des expériences inédites au public. C’est assez bluffant !
Opéra Bastille - Le Marais - Paris

Les cours cachées de Bastille

Vous avez poursuivi la lecture de cet article jusqu’ici… Par votre curiosité, vous méritez donc que je vous livre deux secrets bien gardés. Deux adresses discrètes, presque invisibles aux yeux pressés, et pourtant chargées de charme et d’histoire.

Planquée derrière une grille discrète au 12 place de la Bastille (ou du 12 rue Daval), la cour Damoye est une pépite qui tient son nom d’un quincailler du siècle des Lumières. En y entrant, on change d’époque en une fraction de seconde : pavés usés, façades modestes, ateliers discrets et calme envoûtant.  Autrefois dédiée à l’artisanat et au petit négoce, la cour abritait des ateliers de tourneurs sur bois, de graveurs et d’imprimeurs. Un ancien monte-charge rénové donne encore un air industriel à l’endroit. Aujourd’hui, des graphistes, architectes, torréfacteurs, photographes et concepts stores éphémères y ont posé leurs valises. Le lieu a gardé son âme, celle du faubourg Saint-Antoine, autrefois haut lieu des métiers d’art… comme des insurrections populaires. Une rare impression d’être en ville sans y être, entre lierre, poutres et silence…

passage du cheval blanc - Bastille - Le Marais - Paris

À quelques pas de là, à l’angle du Café Milou, au 2 rue de Faubourg Saint-Antoine, une grande porte cochère donne accès au passage du Cheval-Blanc. Cette impasse ouverte en 1824 présente un concentré d’histoire ouvrière :  six cours successives (portant le nom des premiers mois de l’année), anciennes écuries, ateliers à colombages reconvertis, verrières industrielles… On y sent encore le Paris du XIXe siècle, le Paris qui travaillait en blouse grise, entre bois, cuir et métal. Le nom « Cheval-Blanc » vient d’une auberge où l’on logeait les chevaux des voyageurs arrivant de province. Le bâtiment a évolué, mais l’ambiance de ruche active y demeure : des créateurs, des startups, des croisiéristes s’y croisent aujourd’hui, entre tradition et renouveau.

Rue de Lappe - Bastille - Le Marais - Paris

Rue de Lappe, là où Paris danse encore

Vous êtes toujours là ? Curieux, fidèle, attentif… parfait ! Après les recoins cachés et les quais tranquilles, je vous propose un autre visage de Bastille : plus bruyant, plus coloré, plus nocturne. Bienvenue dans la rue de Lappe, l’artère festive par excellence, où l’histoire populaire de Paris continue de vibrer sous les pavés. Nichée entre la rue de la Roquette et celle de Charonne, la rue de Lappe n’a jamais eu peur du bruit ni du mouvement. À l’origine, c’était une rue d’artisans et d’ouvriers — ferrailleurs, ébénistes, petits commerces — où les Bretons et Auvergnats venus à Paris ont rapidement pris leurs aises au XIXe siècle. Ils y ouvrent des cafés-charbons, lieux de vie simples où l’on pouvait se réchauffer, manger un morceau… et danser au milieu du petit peuple des ouvriers, mais aussi des prostitué(e)s et « apaches », voyous et truands de tous genres. Car très vite, la musique s’invite, et avec elle, un petit miracle typiquement parisien : le bal musette !

Ici, l’accordéon devient roi, la bourrée côtoie la valse, et la java devient un art de vivre. Dans les années 1930, la rue de Lappe compte jusqu’à 17 bals ! Le plus célèbre ? Le Balajo, bien sûr, fondé en 1936 par Jo France, un ancien lutteur devenu roi des nuits. Mistinguett est alors la marraine du lieu. Vous pouvez toujours y aller guincher rock, salsa ou danse retro, entre dorures art déco et tant de souvenirs accrochés aux murs…

Mais que les amateurs de silence ne fuient pas trop vite : la rue de Lappe a également du charme même en plein jour. Derrière les devantures animées, quelques traces du passé persistent : des enseignes anciennes, des pierres marquées par le temps, une atmosphère qui mêle le populaire au bohème. Pour ma part, je vais chercher mes fromages et salaisons d’Auvergne au 6 de cette rue. Pour mes repas entre amis, j’ai mes habitudes « Chez Paul » à l’extrémité de la rue, l’entrée se trouvant au 13 rue de Charonne.

Aujourd’hui encore, on vient à Bastille pour faire la fête, entre bars à tapas, clubs électro, petits restos sans prétention et lieux emblématiques. . La rue de Lappe a changé, bien sûr. Mais l’esprit est toujours là : une rue où Paris ne s’endort jamais vraiment, et où l’on danse et boit encore, parfois sans raison.

Marché Bastille - Le Marais - Paris

Marché Bastille : l’effervescence gourmande

  • Boulevard Richard Lenoir, 75011 Paris
  • Bastille (lignes 1, 5, 8), Breguet-Sabin (L5)
  • Jeudi : 7h00 – 14h30 / Dimanche : 7h00 – 15h00

Maintenant, cap sur le Marché Bastille, un incontournable pour les amateurs de marchés en plein air… et d’aventures gourmandes un brin chaotiques ! Imaginez une ribambelle de stands colorés s’étirant fièrement le long du boulevard Richard Lenoir, sous l’œil bienveillant de la colonne de Juillet. Ce marché qui recouvre les eaux du canal Saint-Martin courant en sous sous-sol est une véritable scène vivante où Paris se dévoile dans toute son exubérance. Ici, chaque jeudi et dimanche, c’est un festival pour les sens – et parfois pour les oreilles, grâce aux commerçants qui n’ont pas leur langue dans leur poche.

Entre les légumes du terroir qui semblent tout droit sortis d’une aquarelle, les fromages à faire pâlir un affineur, et les pains croustillants encore chauds, il y a de quoi remplir votre panier (et accessoirement vider votre portefeuille). Et puis, il y a ces petits extras : des vêtements stylés, des bijoux artisanaux, et même des babioles improbables qui semblent chuchoter « Emmène-moi chez toi ». Laissez-vous charmer par le chant des poissonniers ou le bavardage des clients débattant sur la meilleure façon de cuisiner une lotte. Moi, j’adore y venir tôt pour y déguster au petit déjeuner des huitres arrosées d’un verre de vin blanc (oui, c’est mon rituel du dimanche), mais sachez que si vous arrivez un peu avant la fermeture, vous pourriez bien repartir avec une poignée de fruits ou de fleurs à prix cassé. À bon entendeur…

Charlie Hebdo - Bastille - Le Marais - Paris

Charlie Hebdo : mémoire vive de la liberté d’expression

  • 10 rue Nicolas Appert, 75011 Paris

  • Richard-Lenoir (ligne 5)

Désolé, mais sur la fin de cet article, je vais un peu casser l’ambiance…Je ne peux pas vous parler de Bastille sans évoquer Charlie Hebdo. Car ici, la liberté d’expression n’est pas qu’un concept : elle a un visage, une adresse, une blessure.

En quittant le marché de la Bastille, je vous invite à remonter la rue Richard-Lenoir et à bifurquer vers la rue Nicolas-Appert. Vous y trouverez, au numéro 10 de la « place de la liberté d’expression« , les anciens locaux de la rédaction de Charlie Hebdo. En face du théâtre Comédie Bastille, dans cette petite rue sans prétention, s’est jouée l’une des tragédies les plus marquantes de notre époque contemporaine. Le 7 janvier 2015, en pleine conférence de rédaction, deux hommes armés pénètrent dans les locaux de Charlie Hebdo et ouvrent le feu, assassinant 12 personnes — dessinateurs, journalistes, policiers. Leur « crime » ? Avoir osé dessiner, rire, critiquer. Être libre en somme. Comme tant d’autres avant eux dans ce quartier, eux aussi se sont battus avec des mots, des images, de l’humour pour faire trembler les pouvoirs. Sur les murs, des fresques rendent aujourd’hui hommage aux victimes. Poignantes, sobres, tendres, mordantes. Les noms y sont inscrits comme on sculpte une colonne invisible : Cabu, Wolinski, Charb, Tignous, Honoré, Maris, Renaud, Ourrad, Caya, Brinsolaro, Boisseau, Fieschi…

Ce lieu est modeste, mais chargé. Prenez un moment pour vous y arrêter. Pas pour regarder. Pour penser. Pour se souvenir.

Dans ce même quartier, une autre immense tragédie survient le 13 novembre 2015. A quelques centaines de mètres de Charlie Hebdo, la folie islamiste s’en prend aux spectateurs du Bataclan et clients des terrasses alentours. 132 personnes perdent la vie, 413 autres restent blessées à jamais.

Mais la force de se battre pour ses idées et ses libertés reste intacte. « Fluctuat nec mergitur » est la devise de Paris : « Il est battu par les flots, mais ne sombre pas« ! Tel est l’esprit de Paris et du quartier Bastille.

Hotel Bastille - Le Marais - Paris

Dormir à la Bastille !

Coté Bastille, l’hôtellerie est belle, en cliquant ici, faites votre choix !

Si vous souhaitez vous faire un plaisir luxe, je vous recommande particulièrement « Le Petit Beaumarchais » (à deux pas de l’Opéra et la place de la Bastille avec un merveilleux spa, espace bien-être), la « Maison Breguet » (savourez son délicieux restaurant et son spa), le « Goralska Résidence hotel » (la meilleure vue sur le bassin de l’Arsenal) ou encore le nouveau SO/ Paris Hotel dans le quartier de l’arsenal à la vue absolument spectaculaire sur tout Paris !

Pour les budgets plus doux, je vous recommande surtout le « Oh La La ! Hotel bar » bien situé rue de la Roquette, de même que l’« Hôtel Pavillon Bastille » qui fait face à l’Opéra, le Bastille Spéria ou encore « La Herse d’Or » sur la rue Saint-Antoine, l’Ibis Paris Bastille ou le Moxy proches du marché.

Ne tardez pas à réserver !

Notez que la Bastille est très proche de la place des Vosges qui comprend d’incroyables pépites hôtelières telles le « Pavillon de la Reine & Spa«  ou l’hôtel « Cour des Vosges-Evok Collection » (lire à ce propos ma sélection dans cet article)

Hotel Bastille - Le Marais - Paris

A boire et à manger !

A la Bastille, il y a vraiment « à boire et à manger »…

Les terrasses donnant sur la place de la Bastille semblent s’être lancées dans la compétition des prix les plus élevés et la qualité de service parfois limite… Je ne vous conseille que celles où j’ai mes habitudes : le café des Phares (sympa, efficace pour l’apéro et connu pour avoir été le premier café-philo de France en 1992) et le café français (style Art Déco, plus chic, plus cher aussi). De l’autre côté de la place, je ne me risque pas à vous conseiller quelque adresse… Aussi, de la terrasse du 10 rue Saint-Antoine, le bistrot Antoine vous offre pour sa part une vue la statue de Beaumarchais, le temple protestant, la colonne de juillet et l’Opéra Bastille au loin.

Coté traditions, la brasserie alsacienne Bofinger proclame offrir « la meilleure choucroute de Paris ». Prétentieuse va ! Les avis sont en effet partagés, tout comme ceux sur les autres plats et la qualité du service, mais le décor historique est exceptionnel depuis 1864. Pour ma part, je préfère le charme intemporel de sa voisine d’en face située au 6 rue Bastille : la Grande Brasserie. Si vous préférez la cuisine italienne, faites quelques pas au 2 de cette même rue à l’Auberge de Venise.

Juste à côté, rue des Tournelles, se trouvent une ribambelle d’autres restaurants sympas dont un chouette libanais l’Area situé au numéro 10, les Saveurs d’Antica (couscous et tajines !) au 14, le Bistrot de l’Oulette au 38 ou encore l’Ange 20  situé au 44 à proximité immédiate de la place des Vosges. Le Restaurant H est par ailleurs le seul étoilé Michelin du quartier Bastille, au 13 de la très discrète rue Jean Beausire – faites-vous plaisir  !

Enfin, mes conseils ultimes pour une super mangeaille à la française à prix fort correct : allez donc « Chez Pradel » au 3 rue du Pasteur Wagner ou encore « Chez Paul » au bout de la rue de Lappe, c’est traditionnel, chaleureux et bon.

Santé et bon appétit !

© Julien Dumarais – My Marais Paris

« Je voudrais terminer cet article sur mon quartier en rappelant que Bastille est un carrefour symbolique des mobilisations populaires. Ici, il n’y a pas une seule journée sans une manifestation commençant, passant ou terminant à Bastille !  L’axe des places de la Nation – de la Bastille et de République, ce trio sacré des grandes marches citoyennes, dit tout : la Nation se renforce à Bastille pour (re)faire République. C’est ici que l’on crie, que l’on pleure, que l’on espère, que l’on défile, que l’on lutte ! Et dans cette lutte, les victimes de Charlie Hebdo et du Bataclan rentrent en résonance directe avec ceux qui, en 1789, en 1830, en 1848, ont levé la tête pour défendre un droit fondamental : celui de penser librement, et de l’exprimer, de vivre pleinement.

A la Bastille, la flamme du Génie de la Liberté ne s’éteindra jamais. A bon entendeur, salut ! »

Julien Dumarais, votre meilleur conseiller pour un séjour parfait dans le Marais
Bastille: Mystères et secrets d’une prison d’État

Bastille : mystères et secrets d’une prison d’état

Par Jean-Christian Petitfils

  • Histoire

  • 384 pages

  • En français

  • Editions Taillandier

  • 2024

  • 11 €

La Colonne de Juillet et la place de la Bastille

La colonne de juillet et la place de la Bastille

Par Jean-François Decraene 

  • Histoire et patrimoine

  • 64 pages

  • En français

  • Editions du Patrimoine

  • 2019

  • 14 €

L'opéra Bastille

Regards sur l’Opéra Bastille de Paris

Par Christine Desmoulins

  • Histoire et patrimoine

  • 68 pages

  • En français

  • Editions du Patrimoine

  • 2018

  • 14 €